Page 56 - L'Extension N° 64 / Juin-Juillet 2018
P. 56
.écolonomie/initiative
Un défi à la hauteur
du navire des superlatifs
Race for Water, ce vaisseau au service de la science et de l’environnement, s’est élancé
il y a un an dans une course contre la montre. L’enjeu ? Préserver les océans, menacés
par le fléau du XXI siècle : la pollution plastique.
e
« l est utopiste de vouloir net- et une nouvelle technologie (kite de
toyer les océans des déchets
traction), le bateau, ambassadeur de
plastiques. Contrairement aux
la transition énergétique, a changé
idées reçues, il n’y a pas à pro- de capitaine, d’objectifs et de nom.
I prement parler d’îlot, ou de 7 Rebaptisé Race for Water, il a désor-
e
continent, constitué de macro-déchets mais vocation à répondre, de façon réa-
plastiques mais plutôt une myriade de liste, aux menaces du plastique. Bien
petits fragments, réduits à l’état de que les solutions envisagées soient
Marco Simeoni, soupe, qui voguent au gré des gyres basées à terre avant que le plastique
entrepreneur océaniques en suspension, à la sur- n’atteigne les voies d’eau, le navire est
vaudois passionné face ou jusqu’à plusieurs dizaines de parti en avril 2017 pour une odyssée de
de voile et mètres de profondeur. » Passionné de cinq ans. Cela représente 35 escales
président de la voile et ayant fait une fois le tour des réparties à travers le globe, pour rallier
Fondation Race for gyres lors de la première expédition en le monde à sa cause. Il assure ainsi une
Water 2015, l’entrepreneur vaudois Marco présence forte sur les sites des événe-
Simeoni s’exprime avec véhémence et ments majeurs tels l’America’s Cup aux tèmes. Ainsi, en un an et sept escales,
conviction sur ce sujet qu’il connaît sur Bermudes l’an passé, les JO de Tokyo 23 chercheurs de six nationalités, dont
le bout des doigts. En 2010, il a choisi et l’Exposition universelle à Dubaï en 12 émanant du programme européen
de s’investir totalement pour la cause 2020, et plus généralement, sur les îles JPI Oceans, regroupant plus de 10 uni-
de l’eau en créant la Fondation Race et les villes côtières, là où l’avenir des versités, ont déjà séjourné sur le bateau,
for Water qui s’attèle, depuis, à trouver océans se joue. dans le cadre de missions scientifiques.
des solutions pragmatiques et suscep- Les premières publications de ces tra-
tibles d’être déclinées à grande échelle. LEARN, SHARE, ACT vaux sont prévues d’ici 2019. Le deu-
Véritable plateforme de travail, d’ana- xième, “SHARE”, concerne le domaine
TERRIBLEMENT AMBITIEUX, lyses et de rencontres, le navire s’est de la prévention et de l’information. Sur
MAIS RÉALISTE focalisé sur trois modes opérationnels. le navire, des équipes sensibilisent les
Ses efforts se sont concentrés sur un Le premier, “LEARN”, s’adresse au jeunes générations, mais aussi des
navire, le plus grand en son genre, monde de la recherche, accueillant à industriels, politiques et décideurs, à
fonctionnant à propulsion mixte solaire- son bord des équipes internationales la préservation des océans. Enfin, le
hydrogène-kite, donnant une seconde d’universitaires et des projets pluri- dernier et sans doute le plus important,
vie au catamaran Planet Solar, le vais- disciplinaires. Il s’agit d’étudier la pol- “ACT”, se concentre sur les solutions
seau conduit par Raphaël Domjan, qui lution plastique, la caractérisation des que l’industrie et l’innovation peuvent
avait fait la démonstration de l’efficacité micro-plastiques, les effets éco-toxi- apporter. La Fondation s’est donné pour
du solaire en 2010-2012. cologiques des plastiques marins, ou mission de promouvoir des solutions
Intégrant une autre énergie (éolienne) encore leurs impacts sur les écosys- capables de transformer les déchets
GYRES
Les gyres sont d’immenses tourbillons ou vortex d’eau créés par les vents et les courants
marins, au sein desquels les déchets plastiques se déplaçant dans les océans se
regroupent et s’accumulent, pour former de gigantesques zones de pollution diffuse.
Ce ne sont pas des zones d’accumulation compactes de déchets mais des zones de
pollution diffuse ayant de plus fortes concentrations en microparticules plastiques que les
eaux de pleine mer. Il est encore impossible de cartographier ces vortex de déchets avec
précision. Aujourd’hui, 5 gyres ont été identifiés sur le globe : dans l’Atlantique Nord et Sud,
dans le Pacifique Nord et Sud ainsi que dans le sud de l’Océan Indien.
56 l’EXTENSION / JUIN 2018